Les moteurs à hydrogène suscitent un intérêt croissant dans le cadre de la transition énergétique et de la recherche de solutions de mobilité bas carbone. Alors que les véhicules électriques à batterie dominent le marché des véhicules propres, l'hydrogène se positionne comme une alternative prometteuse, notamment pour les usages intensifs et les véhicules utilitaires. Comprendre le fonctionnement du système d'alimentation en carburant de ces moteurs permet de mieux appréhender les défis et les opportunités de cette technologie.
Le principe de la pile à combustible dans les moteurs à hydrogène
La pile à combustible représente la technologie la plus couramment associée aux véhicules à hydrogène. Son principe repose sur une conversion électrochimique de l'énergie, radicalement différente de la combustion traditionnelle. Cette technologie offre un rendement énergétique supérieur et des émissions nulles à l'utilisation, ce qui en fait une solution particulièrement attractive pour la décarbonation des transports.
La réaction électrochimique entre l'hydrogène et l'oxygène
Au cœur de la pile à combustible se produit une réaction électrochimique fascinante entre l'hydrogène stocké dans le réservoir du véhicule et l'oxygène présent dans l'air ambiant. Cette réaction ne génère ni flamme ni combustion au sens traditionnel du terme. L'hydrogène, une fois acheminé vers la pile, est séparé en protons et électrons au niveau d'une membrane électrolytique. Les électrons, contraints de suivre un circuit externe, créent un courant électrique exploitable, tandis que les protons traversent la membrane pour rejoindre l'oxygène de l'autre côté. La combinaison finale de ces éléments produit uniquement de la vapeur d'eau, de la chaleur et de l'électricité.
Pour que cette réaction fonctionne de manière optimale, la pureté de l'hydrogène doit être extrêmement élevée, supérieure à 99,99 pour cent. Cette exigence garantit le bon fonctionnement de la membrane et la longévité de la pile à combustible. Le rendement énergétique de ce processus se situe entre 40 et 50 pour cent, ce qui est significativement supérieur aux moteurs à combustion interne traditionnels. Cette efficacité énergétique constitue l'un des avantages majeurs de la technologie par rapport aux moteurs thermiques classiques.
La production d'électricité pour alimenter le moteur électrique
L'électricité générée par la pile à combustible alimente directement un moteur électrique, similaire à celui utilisé dans les véhicules électriques à batterie. Cette architecture bi-énergie, développée notamment par Renault Group, combine une batterie lithium-ion rechargeable et une pile à combustible hydrogène pour optimiser à la fois l'autonomie et le temps de recharge. La batterie sert de tampon énergétique, absorbant les pics de demande lors des accélérations et récupérant l'énergie au freinage, tandis que la pile à combustible fournit une production continue d'électricité.
Cette complémentarité entre batterie et pile à combustible permet d'augmenter significativement l'autonomie du véhicule tout en conservant les avantages d'un fonctionnement silencieux et sans émissions polluantes. La chaleur produite lors de la réaction électrochimique est également valorisée pour le chauffage de l'habitacle, améliorant ainsi l'efficacité globale du système. Les constructeurs comme Alpine ont présenté en 2024 des concepts comme les Alpenglow Hy4 et Hy6, démontrant le potentiel de cette technologie même pour des applications sportives.
Les composants du système d'alimentation en hydrogène
Le système d'alimentation en hydrogène d'un véhicule se compose de plusieurs éléments techniques sophistiqués, chacun jouant un rôle crucial dans le fonctionnement global du moteur. La conception de ces systèmes répond à des exigences strictes de sécurité et d'efficacité, compte tenu de la nature particulière de l'hydrogène comme vecteur énergétique.
Le réservoir haute pression et le stockage de l'hydrogène
Le stockage de l'hydrogène représente l'un des défis majeurs de cette technologie. L'hydrogène étant le gaz le plus léger de l'univers, il nécessite une compression importante pour être stocké en quantité suffisante dans un volume raisonnable. Les réservoirs utilisés dans les véhicules à hydrogène sont des réservoirs haute pression, généralement conçus pour résister à des pressions de 700 bars, soit environ 700 fois la pression atmosphérique. Ces réservoirs sont fabriqués en matériaux composites multicouches, combinant une coque interne étanche et des couches externes en fibres de carbone pour garantir une résistance mécanique exceptionnelle.
L'hydrogène peut également être stocké sous forme liquide, ce qui permet une densité énergétique supérieure, mais cette solution nécessite un refroidissement à des températures extrêmement basses, autour de moins 253 degrés Celsius. Cette approche est principalement réservée aux applications industrielles ou de transport lourd en raison de sa complexité technique et de sa consommation énergétique. Pour les véhicules particuliers et utilitaires légers, le stockage sous pression reste la solution privilégiée en raison de sa simplicité relative et de son efficacité.

Le circuit de distribution et les régulateurs de pression
Une fois l'hydrogène stocké à haute pression dans le réservoir, il doit être acheminé vers la pile à combustible ou le moteur à combustion à une pression adaptée. Le circuit de distribution comprend des régulateurs de pression qui abaissent progressivement la pression de l'hydrogène de 700 bars à quelques bars seulement, selon les besoins du système. Ces régulateurs sont équipés de multiples sécurités pour prévenir toute fuite ou surpression, garantissant un fonctionnement sûr en toutes circonstances.
Le système inclut également des capteurs de pression et de température tout au long du circuit, permettant une surveillance continue et une gestion optimale du flux d'hydrogène. L'injection directe d'hydrogène, particulièrement dans les moteurs à combustion interne hydrogène, est une solution technique qui évite le phénomène de pré-allumage et améliore l'efficacité de la combustion. Les soupapes, bielles et injecteurs de ces moteurs doivent être spécialement modifiés pour s'adapter aux propriétés physiques de l'hydrogène, qui diffèrent notablement de celles des carburants fossiles traditionnels.
Les avantages et les spécificités techniques des véhicules à hydrogène
Les véhicules à hydrogène présentent des caractéristiques techniques distinctives qui les positionnent favorablement dans certains segments de la mobilité, particulièrement pour les applications professionnelles et les usages intensifs en boucle fermée.
L'autonomie et le temps de recharge comparés aux véhicules électriques
L'un des avantages majeurs de l'hydrogène réside dans le temps de recharge exceptionnellement court, comparable à celui d'un véhicule thermique traditionnel. Un plein d'hydrogène s'effectue en environ cinq minutes, contre plusieurs heures pour recharger une batterie de véhicule électrique. Cette rapidité de ravitaillement rend les véhicules à hydrogène particulièrement adaptés aux flottes de véhicules utilitaires, aux bus et aux camions qui nécessitent une disponibilité maximale et des temps d'immobilisation réduits.
L'autonomie des véhicules à pile à combustible bénéficie de la complémentarité entre la batterie et la pile, permettant de parcourir des distances importantes sans recharge. Cette caractéristique en fait une solution idéale pour les trajets longue distance et les applications nécessitant une grande autonomie. L'Allemagne, les Pays-Bas et la France sont en tête des immatriculations de véhicules à hydrogène en Europe depuis 2020, témoignant d'un intérêt croissant pour cette technologie. Le développement de l'infrastructure de stations hydrogène suit cette dynamique, avec la France comptant 23 stations en opération en 2023 et visant 900 stations en 2030, l'Allemagne en installant 109 avec un objectif de 300 en 2030, l'Espagne avec 3 stations opérationnelles et un objectif de 150 en 2030, et les Pays-Bas avec 12 stations en cours et un objectif de 150 dès 2025.
Les émissions et l'impact environnemental du moteur à hydrogène
L'impact environnemental des véhicules à hydrogène dépend fortement de la méthode de production de l'hydrogène. L'hydrogène vert, produit par électrolyse de l'eau en utilisant des énergies renouvelables comme le photovoltaïque ou l'éolien, offre un bilan carbone quasi nul sur l'ensemble du cycle de vie. À l'inverse, l'hydrogène gris, extrait à partir de combustibles fossiles, présente un bilan environnemental bien moins favorable. L'essor de l'hydrogène comme vecteur énergétique pour la mobilité dépendra donc largement du développement de capacités de production d'hydrogène vert ou bas-carbone.
Les véhicules à pile à combustible n'émettent aucun polluant à l'utilisation, rejetant uniquement de la vapeur d'eau. Cette caractéristique en fait des véhicules à émissions zéro au sens strict. Les moteurs à combustion interne hydrogène, bien qu'utilisant une technologie ancienne remontant à 1806, connaissent un regain d'intérêt pour leur potentiel de décarbonation. Leur rendement énergétique actuel se situe entre 20 et 30 pour cent mais pourrait évoluer jusqu'à 50 pour cent avec les développements technologiques. Si ces moteurs utilisent de l'hydrogène pur, ils ne produisent pas de CO2, mais peuvent générer des NOx, bien qu'en quantité moindre qu'un moteur diesel. Le coût d'un moteur à hydrogène reste actuellement supérieur de 50 pour cent à celui d'un moteur essence ou diesel, un écart qui devrait se réduire avec l'industrialisation et les économies d'échelle.
Le retrofit hydrogène, autorisé en France depuis mars 2020, permet de transformer des véhicules thermiques existants en véhicules à motorisation hydrogène. Pour être éligible, le véhicule doit avoir plus de cinq ans, la puissance après transformation doit représenter entre 65 et 100 pour cent de la puissance d'origine, la répartition des masses ne peut varier de plus de 10 pour cent par essieu, et le poids total doit rester dans une marge de plus 20 pour cent par rapport au véhicule d'origine. Cette approche contribue à accélérer la transition vers une mobilité bas carbone en valorisant le parc automobile existant.